Confrontation fantomatique

Scène :
Derrière un rideau de velours rouge, une chaise en bois années 30, le dossier et l’assise sont rehaussé d’un cuir noir tendu à tout rompre, l’odeur qui s’en dégage est âpre. Sur la chaise elle-même, une femme nue, cheveux masquant habillement le visage et les seins, corps immobile, froid et diaphane.
En face de cette cette personne assise, un homme comme figé par l’âge et le temps, dans la position de l’exaspération, hurlant à la mort, aphone, brûlant du feu de la colère.

Dialogue :
L’homme se tient sur la pointe des pieds, penché à l’extrême en avant, costume de ville années 30. La bouche mime le hurlement, mais les lèvres ne bougent pas pourtant :
-N’as tu donc rien à me dire ? Es-tu silence pour la fin de tes jours, de tes nuits sans sommeil. Muraille sans vie pourrai-je t’instruire l’émoi autrement que par la force ?
-(silence)
-Tu es le mirage de toi-même, vie sombre et palpitante, tu es blanche comme le lin, toile vierge, menaçante. Me répondras-tu enfin quand je serai mort de t’avoir vénéré ?
-(silence, larme tombant mollement au sol, corps inflexible)
-Je meurs si ce n’est pas du plaisir que tu ressens à me détruire, le silence est ton arme, maintenant tu m’assassines
et tu en pleures à peine.
-(silence)
-Qu’en est-il du parapet insomniaque qui sculptait nos vies, n’étions nous pas heureux de vivre sagement, attendant la mort, sourire aux lèvres, bravant même les petits plaisirs par l’abstinence ?
-Silence.
-Tu parles enfin ? tu nommes ton arme, tu nommes ton désir. Tu te complais dans la naïveté du refus. Je te parle de regarder devant toi, ce sont ces danses macabres qui nous attendent.
-Silence. (la voix se fait plus forte)
-Oui, parle mon ange, parle aux murs si tu me détestes toujours autant, mais parle. Le frémissement de ton souffle entre chaque mot est un onguent sur mes plaies, parle miroir de mon existence !
-Silence. (la voix est si forte que l’homme doit protéger ses tympans de ses deux mains)
-Hurle mon amie, hurle tant que tu peux, cette vie t’appartient, ouvre un chemin sur hier, enfuis toi si tu le veux, la mort te rattraperas que tu le veuilles ou non. On peut raccourcir le chemin unique en coupant court à certaines difficultés mais on ne croise pas deux fois  le même pavé sous le pied !
-(Silence)

Reprendre la lecture à la première réplique, autant de fois qu’il le faudra. Aucune leçon n’est donnée. Aucun avis n’est prononcé, ce n’est que le récit d’un voyage entre un miroir et son reflet.

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