Ken Park 17102003

Je déplore à cet instant que toute vie puisse exister.

Dans l’appartement d’à côté, un mort d’avance dégomme son chien
à grands coups de latte. Le bruit sourd des coups sur la fourrure
donne une sensation de lourdeur, de silence rompu.
Au dessus, ça baise.
En dessous, ça baise, seule.
Par la fenêtre, toujours fermée, une voiture passe, c’est un mirage.
A quand la dernière voiture ?

Le fauteuil greffé au cul, l’anonyme chevelu attend quelque chose.
Du film Ken Park de Larry Clark

Entre perversions et plaisirs
à travers la transparence de la vie de cinq post-adolescents californiens
on découvre avec angoisse et stupeur un univers de rupture
de mort, de vie, d’amour, de haine.
Un melting-pot à l’américaine en quelque sorte, traité avec objectivité
sans limite de cruauté, de pudeur ou de tout autre sentiment artificiel
Depuis la vie tranquille d’un petit couple de vieux jusqu’à l’errance
d’un skateur à la poursuite de la vie jusque dans la mort elle-même
ce sont de véritables vies qu’on décapsule dans ce film et qu’on déguste
avec chacun sa propre subjectivité.

La rage des uns se mêlant à la détresse des autres
Autant les acteurs sont tous issus d’un casting parfait
que l’ensemble parait improbable parcequ’il va trop loin dans le réalisme
On touche au porno, à l’ultra-violent,
on pénètre l’univers glauque des croyants extremistes,des nymphes,
des limbes même.

Au fil de l’horreur, du dégoût, on se prend des scènes d’amour dans la
gueule à ne pas en revenir indeme, au rythme masturbatoire d’un voisin
de salle. On entend un ricanement aux dialogues d’un père qui perd
toute autorité sur lui-même et sur son fils.

L’homosexualité, la bisexualité, le sadomasochisme sont autant d’autres
thèmes abordés. En faire la liste serait à la fois trop long
et fort peu intéressant tant l’ensemble forme un tout parfait.
Le cadrage est génial, on notera des plans anthologiques, surprenant
ou tout simplement adaptés aux émotions transmises.

Si vous cherchez un film alternatif sur les états-unis, ce film est pour
vous.
Si vous cherchez un film de cul avec un vrai scénario, des vrais dialogues
et d’excellents acteurs, ce film est pour vous.
Si la vie n’a pas de sens pour vous, ce film est pour vous. Pour une petite
claque bruyante et douloureuse dans la gueule, entendons-nous.
Si vous avez l’esprit bloqué, si vous êtes très sensibles, si vous n’avez
jamais vu le sexe d’un homme, d’une femme, si vous considérez que le cul
sous toutes ses formes est sale. Allez y progressivement.
C’est pas facile d’encaisser en 1h40 tous les trucs que vous avez pas encore
vécu ou que vous ne pourrez plus jamais vivre. De se sentir vivant, tout
d’un coup.

Je fais encore un pas de plus, et vous dis :
Ken Park, je le compare à J’aimerais pas crever un dimanche,
dans deux milieux différents, et à deux âges différents.

Votre avis : sainthuitre@free.fr

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