Je vous emmerde tous
et toi la vie
et toi la mort

dans un putain de souffle
qu’on aime la vie
qu’on se tutoie à mort

C’était une froide nuit d’hiver
je ne sais quelle folie m’avait pris
de vouloir suivre cette muse
avant tout cette silhouette de femme libre
de femme sereine et belle comme nul ne saurait la décrire.

Il faisait si froid que le moindre des gémissements
causait un brouillard de buée devant nos yeux affaiblis
et larmoyants.
Il fallait que je la suive,
parcequ’elle semait en moi le désordre et la passion
et que quitte à suivre la destruction jusqu’à son
aboutissement
il fallait bien que j’en connaisse la génitrice.

Là, au carrefour de deux mondes,
entre la richesse des meubles et des vitrines
entre la pauvreté de la rue
de ses habitants perpetuels
entre tout ce drame dans lequel nous tous vivons à cette époque blanche
là,
je la vis de face, affrontant vaillamment le vent, la neige fondue
la colère d’un mort de froid
la douceur d’un sourire d’enfant handicapé

elle me vit, détournit le regard avec une langueur monotone
etions nous donc en automne ?
Elle me perdit de vue bien vite, je m’effaçait puisqu’elle ne voulait pas de moi
elle ne me regardait pas.

Bientôt, transis par le froid
je préférais le chemin du retour,
détruit, par cette défaite
par cette rencontre qui n’eut comme fin que notre fuite
chacun de notre côté
et vous, vous dans ma mémoire, encore
la silhouette féminine là dans mes larmes gelées
dans ma salive épaisse
dans mon sang noir.

Comment aurais-je pu alors deviner que j’aimais la porteuse du message
dont on ne sort pas indeme
comment aurais-je pu me persuader de quitter des yeux ce démon plaisant
comment ?

J’ai aimé la faucheuse
jusque dans le bleu de ses yeux
dans le blond de ses cheveux
et dans la noirceur de son âme
j’ai aimé la mort,
elle était belle, et mon coeur y a cédé.
Etais-je alors le seul à la voir ?