Un essai 19092006

Montrant une esquisse de vierge à l’enfant
– Tu aimes ?
– Je ne pourrais pas dire que j’aime ou que je n’aime pas
ce tableau ne me dit absolument rien, il passe inaperçu.
– OUI ! (exalté)
– Tu es heureux ?
– C’est exactement la réponse que je désirais…

(noir, lumière sur la visiteuse)

Froidement
– Voilà Marc, le sujet de cette histoire.
cela fait trois mois qu’il est dans un délire
artistique du « vide » du « néant » du « sans intérêt »
Inutile de signaler que Marc est pauvre
inconnu et… sans intérêt pour la profession.
C’est un peintre. Parcequ’il ne sait rien faire
d’autre. Rien d’autre que parler d’art, et essayer d’en produire.

(retour à la scène)

– Je l’ai intitulé « La sorcière »
mais j’hésite encore avec « Vierge à l’enfant »
et « la cueilleuse de pommes innocente ».
Qu’en penses-tu ?

– Rien, absolument rien. Je t’ai apporté des provisions.
(elle sort d’un panier en osier une bouteille de vin
un pain et une terrine de pâté fermier.

– Merci. Infiniment merci. Je ne te mérite pas.

– C’est aussi ce que je pense. A bientôt Marc.

– Aurevoir, muse d’entre les muses !

(noir)
(retour sur la visiteuse)

– J’ai vécu avec ce type. Quelques temps.
Je ne peux pas dire qu’il m’a séduit. Ce serait plutôt
de l’apitoiement. Il me faisait pitié. Il
croquait des gens dans la rue, dans son beau costume
de suffisance, sûr de lui, imbécile.
On s’est quitté, et puis je m’occupe de lui maintenant.
Peut-être parceque je crois qu’il peut encore devenir quelqu’un
finalement…

(chez Marc, la visiteuse entrant)

– Tu aimes ?
– …c’est la même chose que la fois dernière…
tu n’as pas avancé, c’est toujours aussi… nul.
– Oh, toi tu n’es pas de bonne humeur. Qu’est ce qui t’arrive ?
– Non non, tout va bien.
– Alors…
– Tu n’en as pas marre à la fin ?
– De ?
– De n’être rien, et de ne rien faire ?
– Et toi, tu n’en as pas marre de venir me voir ?
– Parfois je me demande…
– Tu sais, tu as de la chance de pouvoir me fréquenter.
– (désabusée)
– Tu n’imagines même pas le nombre de nanas qui déboule
dans cet atelier et qui lance instinctivement :
 » ce tableau ne me dit rien, il est vide ». Je n’ai pas
besoin de toi pour ça. Non, tu ne t’en rends pas compte.
– (après un temps, vérifiant un placard)
Tu ne peins pas mais tu consommes, finalement c’est peut-être
pour ça que je passe régulièrement.
– Ah ! Je ne te demande rien.
– Mais tu es bien content que je passe. Avec du pain et du vin.
– Touché ! Veux-tu que je trouve quelqu’un d’autre pour cette tâche ?
– Tu es trop aimable. Moi aussi, ça me fait plaisir de te voir.

(noir)

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